Les villes se mettent la tête à l'envers

Les villes se mettent la tête à l'envers
Les panneaux d’entrée des villes et villages, éléments familiers de notre paysage urbain, font l’objet d’une curieuse contestation par les agriculteurs qui les retournent pour exprimer leur mécontentement. Retour sur ce phénomène singulier et ses implications.

Les panneaux d’entrée des villes et villages à l’envers

Depuis quelques jours, vous avez peut-être remarqué que certains panneaux d’entrée des villes et villages ont été mis à l’envers. Il ne s’agit pas d’une erreur de montage ou d’un acte de vandalisme, mais d’une action symbolique menée par des agriculteurs en colère. Ces derniers ont décidé de renverser les panneaux pour exprimer leur ras-le-bol face aux contraintes et aux taxes qui pèsent sur leur activité. Cette opération, baptisée « On marche sur la tête », a été lancée par les Jeunes Agriculteurs, un syndicat agricole majoritaire allié à la FNSEA, la principale organisation professionnelle du secteur.

Elle vise à alerter le grand public et les pouvoirs publics sur la situation difficile que vivent les exploitants agricoles, confrontés à des normes environnementales et sanitaires de plus en plus strictes, à une concurrence internationale déloyale et à une baisse des revenus.

Le choix de renverser les panneaux n’est pas anodin. Il symbolise le sentiment d’inversion des valeurs et des priorités que ressentent les agriculteurs. Selon eux, au lieu de soutenir l’agriculture française, qui assure la souveraineté alimentaire du pays et participe à l’aménagement du territoire, les autorités françaises et européennes leur imposent des règles qui les empêchent de produire et de vivre dignement de leur métier.

Résumé du phénomène de contestation des agriculteurs

Le phénomène de contestation des agriculteurs a commencé fin octobre 2023, dans le département du Tarn, où plus de 200 communes ont vu leurs panneaux d’entrée de ville inversés en l’espace d’une semaine. L’action a ensuite gagné du terrain partout en France, touchant des villes et des villages de toutes tailles et de toutes régions.

Selon les Jeunes Agriculteurs, plus d’un millier de panneaux ont déjà été mis à l’envers. Les agriculteurs ont choisi de mener cette action de manière pacifique et discrète, sans bloquer les routes ni perturber la circulation. Ils ont simplement déboulonné les panneaux la nuit et les ont remis à leur place, mais à l’envers.

Ils ont également apposé des autocollants avec le logo des Jeunes Agriculteurs et le slogan « On marche sur la tête » pour revendiquer leur geste. Les agriculteurs ont reçu le soutien de nombreux élus locaux, qui ont compris le message et ont accepté de laisser les panneaux à l’envers. Certains maires ont même participé à l’action, en accompagnant les agriculteurs ou en renversant eux-mêmes les panneaux de leur commune. D’autres ont exprimé leur solidarité en publiant des photos des panneaux inversés sur les réseaux sociaux, avec le hashtag #OnMarcheSurLaTete.

Causes et situation d’exemple

Les causes de la colère des agriculteurs sont multiples et complexes. Elles tiennent à la fois à des facteurs structurels, liés à l’évolution du marché agricole mondial, et à des facteurs conjoncturels, liés à la crise sanitaire et économique.

La hausse des taxes sur le gazole non routier (GNR), qui représente un coût important pour les exploitations agricoles en est la première cause. Les agriculteurs demandent un moratoire sur cette mesure, qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2024, et qui va augmenter le prix du litre de GNR de 18 centimes.

Ensuite, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, qui vise à protéger l’environnement et la santé des consommateurs, mais qui pose des problèmes techniques et économiques aux agriculteurs, est également déplorée. Les agriculteurs réclament plus de souplesse et de pragmatisme dans l’application de cette règle, qui doit être harmonisée au niveau européen.

Pour finir, la concurrence déloyale des produits importés qui ne respectent pas les mêmes normes de qualité et de traçabilité que les produits français et qui bénéficient de subventions ou d’accords commerciaux avantageux est aussi dénoncée. Les agriculteurs demandent plus de protectionnisme et de réciprocité dans les échanges agricoles, ainsi qu’une meilleure valorisation de l’origine et du savoir-faire français.

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