Les grues cendrées, ambassadrices de la migration
Reconnaissables à leur long cou et à leur plumage gris élégant, les grues cendrées comptent parmi les plus grands oiseaux d’Europe. Chaque automne, elles quittent les pays scandinaves et baltes pour rejoindre l’Espagne et, parfois, le nord de l’Afrique. Ce voyage migratoire de plusieurs milliers de kilomètres ne se fait pas d’un seul trait : il nécessite des haltes stratégiques. Le lac du Der, créé dans les années 1970 pour réguler la Marne et protéger Paris des crues, est rapidement devenu une étape incontournable sur leur route.
La richesse écologique du site, ses vastes zones humides et ses berges peu perturbées offrent aux oiseaux des conditions idéales pour se reposer et se nourrir. Les chiffres donnent la mesure de l’événement : certaines années, plus de 200 000 grues peuvent être recensées autour du lac, un record qui place la Champagne parmi les lieux de migration les plus importants d’Europe. Cet afflux impressionnant fait écho à d’autres sites majeurs de migration comme la Camargue ou le parc national de Doñana en Espagne, tous reconnus pour leur rôle dans la préservation des espèces.
Un rendez-vous incontournable au lever du jour

Ce qui frappe en premier, c’est l’ambiance particulière qui précède le décollage. À l’aube, les oiseaux se réveillent en lançant des appels sonores qui résonnent à travers la brume. Puis, par vagues successives, les grues s’élèvent dans le ciel, déployant leurs grandes ailes dans un ballet majestueux. L’air froid du matin, la lumière dorée du soleil levant et l’énergie de milliers d’oiseaux en mouvement créent un moment unique, souvent décrit comme une véritable chorégraphie naturelle.
Pour profiter pleinement du spectacle, la période la plus propice s’étend d’octobre à novembre, même si certains vols peuvent encore être observés jusqu’en février. Les amateurs de photographie animalière s’y rendent parfois dès quatre heures du matin pour être aux premières loges. Le site officiel du lac du Der propose régulièrement des informations pratiques et actualisées sur les meilleures conditions d’observation, ce qui facilite la préparation d’une sortie.
Les lieux d’observation à privilégier
Tout autour du lac, plusieurs points d’observation permettent de vivre ce moment sans perturber les oiseaux. Les digues et observatoires aménagés offrent une vue dégagée sur les zones de repos des grues. Parmi les lieux les plus prisés, on retrouve l’observatoire de Chantecoq ou encore celui du port de Giffaumont, qui garantissent un panorama idéal sur le lac au lever du soleil.
À quelques kilomètres, Montier-en-Der s’est imposée comme une véritable capitale de la photo animalière. Chaque année, en novembre, la ville accueille le Festival international de la photo animalière et de nature, un événement de renommée mondiale qui attire des milliers de visiteurs et de professionnels venus partager leur passion. Cet ancrage culturel renforce l’attrait du territoire et fait du lever des grues un rendez-vous incontournable, aussi bien pour les scientifiques que pour les curieux.
L’importance de la préservation de ces espaces est également rappelée par les associations naturalistes locales et les offices de tourisme. La Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) insiste notamment sur le rôle vital des zones humides pour de nombreuses espèces migratrices, ce qui confère au lac du Der une dimension écologique au-delà de son attrait touristique.
Un attrait touristique et culturel pour toute la région

Au-delà de l’observation ornithologique, le passage des grues constitue un atout majeur pour le tourisme local. Chaque automne, les hébergements de la région enregistrent un taux de fréquentation élevé, les restaurants proposent des menus inspirés des produits locaux et les guides organisent des sorties pédagogiques autour du lac. Ce dynamisme contribue à la vitalité économique des communes environnantes.
La migration des grues est aussi l’occasion de découvrir le patrimoine culturel du territoire. À moins d’une heure de route, la ville de Troyes séduit par ses ruelles médiévales et ses maisons à pans de bois, tandis que Reims, avec sa cathédrale inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, rappelle le riche héritage de la Champagne. Ces étapes culturelles complètent parfaitement un séjour nature, créant un équilibre entre découverte ornithologique et exploration patrimoniale.
Enfin, l’attrait pour les grues cendrées participe à une prise de conscience plus large sur la protection de la biodiversité. Les initiatives pédagogiques menées autour du lac, qu’elles soient destinées aux scolaires ou aux familles, contribuent à sensibiliser les visiteurs à l’importance des migrations et à la fragilité des écosystèmes. Cette dimension éducative, couplée à l’émotion brute suscitée par le lever des grues, fait du lac du Der un site où la beauté de la nature se mêle à une véritable mission de transmission.